Je suis écœuré par l’indécence fiscale qui règne encore en Europe, malgré les scandales à répétition. Du 8 au 12 février, le journal Le Monde, en coopération avec un consortium international de journalistes, a publié une série d’enquêtes sur le Luxembourg, intitulées #OpenLux. Cette nouvelle investigation révèle l’ampleur de l’évasion fiscale qui transite via ce pays, paradis fiscal au sein de l’UE, privant ainsi les autres États membres de recette fiscales pourtant indispensables.
Quelques données clés :
Il y a au Luxembourg au moins 55 000 sociétés offshore, gérant des actifs dont la valeur atteint au moins 6 500 milliards d’euros.
Près de 90 % de ces sociétés sont contrôlées par des non-Luxembourgeois. Parmi les quelque 157 nationalités représentées, les Français se distinguent : ils occupent la tête de liste avec, au total, plus de 17 000 sociétés.
On y retrouve 39 des 50 premières fortunes françaises. A elles seules, elles détiennent 535 sociétés luxembourgeoises.
15 000 Français y possèdent des sociétés, totalisant 100 milliards d'euros d'actifs, soit 4 % du PIB de notre pays.
29 des 37 groupes du CAC 40 ayant leur siège en France sont présents au Luxembourg, par le biais d’au moins 166 filiales.
Si cette enquête a pu aboutir, il faut le dire : c’est grâce à l’UE et en particulier aux efforts des écologistes au Parlement européen ces dernières années pour renforcer la transparence en matière de fiscalité.
Les données exploitées par les journalistes sont en effet tirées d’une nouvelle obligation d’une directive européenne : celle de tenir un Registre de transparence des bénéficiaires effectifs pour les sociétés et les fonds d'investissement. C’est-à-dire un registre qui permet de savoir qui se cache derrière les sociétés aux fils parfois nombreux et aux montages extrêmement complexes. C’est indispensable pour vérifier que chacun, chaque entreprise, paye sa juste part d’impôts. Renforcer la transparence n’est donc pas vain : ça permet d’y voir plus clair.
Il faut mettre le Luxembourg sur la liste noire des paradis fiscaux, ainsi que les autres États membres aux pratiques similaires. Il est temps d’appeler un chat un chat.
Il faut adopter d’urgence un taux minimum d’imposition effectif sur les sociétés au niveau européen. Effectif, ça veut dire le taux que l’on paye vraiment ; pas celui sur le papier mais dont on ne paye qu’une infime partie grâce à des artifices et des sociétés-écrans. C’est indispensable pour mettre un terme à la course vers le moins-disant fiscal.
Il faut rétablir un impôt sur la fortune effectif en France, et harmoniser ce type d’imposition au niveau européen, sans quoi la lutte contre les inégalités sera vaine.
Il faut sanctionner les fraudeurs fiscaux avec fermeté. Sans double-standard. Cela passe notamment par un renforcement des moyens du Parquet financier.
Il faut aussi sanctionner les États membres qui n’appliquent pas correctement leurs nouvelles obligations en matière de transparence fiscale. L’enquête a montré que les Registres tenus par les États étaient encore largement perfectibles !
Il y a urgence à bannir les paradis fiscaux de notre Union.
Le vol de produits fiscaux d’un Etat à l’autre n’a pas sa place dans une communauté de solidarité.
Le sujet sera à l’ordre du jour de la session plénière de mars, et au sein de notre commission parlementaire dédiée à ces questions. Vous pouvez compter sur moi pour poursuivre le travail des Verts en faveur de la justice fiscale.
Député Européen Verts / ALE**,
Président de l’Association Nationale des Villes et Territoires Accueillants.
Damien Carême est né en Lorraine.
Il est élu maire de Grande-Synthe, dans le Nord, en 2001 et le reste jusqu’en mai 2019, date à laquelle il entre pour la première fois au Parlement européen.
Durant 18 ans, à Grande-Synthe, il mène une politique mue par l’écologie sociale et transforme ainsi radicalement la ville. Capitale française de la biodiversité en 2010, Grande-Synthe voit naître des jardins partagés, des quartiers totalement repensés, des repas 100% bio et locaux dans toutes les cantines, une démarche d’autonomie alimentaire, des transports en commun gratuits, un minimum social garanti (MSG) pour les habitants vivants sous le seuil de pauvreté, une université populaire, des ateliers de fabrique de l’autonomie… Un objectif, clair : créer du sens commun et véritablement entrer « en transition ».
Fin 2015, le conflit syrien pousse à l’exil des milliers de personnes. A Grande-Synthe, ces femmes, ces hommes et ces enfants réfugié.e.s arrivent et stagnent dans des conditions indignes : Damien Carême, contre l’avis de l’Etat, réagit et avec l’aide de Médecins Sans Frontière, met en place le premier camp humanitaire sur le territoire français. Dans la foulée, il fonde l’Association Nationale des Villes et Territoires Accueillants, qu’il préside.
En mai 2019, il est élu député européen. Avec 12 autres élu.e.s, il rejoint alors le groupe des Verts / ALE au Parlement européen, où il intègre plusieurs commissions : la Commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures (LIBE), la Commission industrie, recherche et énergie (ITRE) et la Commission des affaires économiques et monétaires (ECON). Il intègre également une délégation : la délégation Afrique du Sud.
Ce qui l’anime ? Poursuivre les missions et les combats entamés à Grande-Synthe, agir à grande échelle en faveur de l’écologie sociale, respectueuse de la dignité, des droits fondamentaux et de la justice environnementale.
- Président de l'Association des Maires Ville & Banlieue de France en 2014-2015
- Prix Nord/Sud du Conseil de l'Europe en 2018
- Prix Éthique et Société, avec Mention Spéciale du Jury, de la fondation Pierre Simon en 2016
- 9e "Meilleur maire du monde", décerné par la City Mayor Fondation en 2016
- 2016, « On ne peut rien contre la volonté d’un homme » (éd. Stock), livre écrit avec Maryline Baumard