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24 avril 2023

Mayotte : L’opération Wuambushu, la honte de la République !

A Mayotte, l’opération militaro-policière Wuambushu a débuté dans la nuit du dimanche au lundi 24 avril. Extrêmement préoccupé face aux violations massives des droits humains, du droit européen et international que fait craindre cette opération de destruction et d’expulsions de grande ampleur, et alerté par des ONGs et des collectifs particulièrement inquiets, je me rends cette semaine à Mayotte afin d’observer et de documenter toute entorse éventuelle au droit et à la procédure d’asile, ainsi qu’aux droits consacrés par la Convention Européenne des Droits de l’Homme.

Préparée par Gérald Darmanin pendant des semaines dans un silence anxiogène, cette action militaro-policière d’expulsions massives risque fortement d’enfreindre les principes de l’État de droit et de bafouer les droits fondamentaux des habitant·es de l’île.

Sous cette appellation militaire aux relents néo-coloniaux, l’opération Wuambushu - reprise en Mahorais - aurait pour but de « lutter contre l’immigration illégale, l’insalubrité publique et l’insécurité sur l’ensemble du territoire », assimilant une nouvelle fois insécurité et immigration. En réalité, elle ne va faire qu’encourager des discours de haine déjà fort prégnants, favoriser des affrontements communautaires violents, et aggraver les atteintes déjà portées quotidiennement aux droits de personnes dans ce 101e département français, abandonné et méprisé par les gouvernements successifs. Les affrontements entre populations locales et forces de l’ordre qui ont déjà eu lieu, l’opération à peine lancée, confirment mes craintes.

Cette opération ne s’attaque pas seulement à l’habitat insalubre et à la migration irrégulière : elle s’attaque aux pauvres !

Avec l’opération Wuambushu, Gérald Darmanin semble vouloir faire de Mayotte le laboratoire de sa politique : violente, inhumaine et indigne. En guise de réponse à la pauvreté et à la délinquance qui frappent durement le 101è département français - 80% de la population vit sous le seuil de pauvreté, 40% dans des habitations informelles -, à  la crise de l’eau et de la vie chère, à l’épuisement des populations face au manque de structures sanitaires et scolaires, Darmanin applique sa solution “miracle” : un mélange de répression et d’alimentation des discours de haine. Une réponse que l’on sait aussi inefficace que dangereuse.

La situation qui prévaut à Mayotte est relativement méconnue des Français·es de métropole. Archipel de l'océan Indien situé entre Madagascar et la côte du Mozambique, son rattachement à la France est contesté juridiquement par l’ONU et l’Union africaine. Sa départementalisation en 2011 a brisé un peu plus encore le principe d’unité territoriale de l’archipel des Comores où la liberté de circulation entre les îles était la norme. Devenu département français, Mayotte aurait pu bénéficier des moyens de l’Etat Français et des droits des autres départements : investissements dans l’éducation, la santé, l’éradication de la pauvreté etc. Et pourtant, il n’en est rien !

L'État français n’a cessé de se désengager de ses responsabilités en “sous-dotant” le département de Mayotte

La France, incapable de répondre aux besoins et aux enjeux complexes de ce territoire, a abandonné ses habitant·es. Déjà placé·es dans une situation de grande précarité et d’extrême vulnérabilité, l'État français ne cesse de bafouer leurs droits.

En matière de migration, loin de se conformer à ses obligations, le gouvernement français multiplie les dérogations au droit commun appliqué en métropole et continue de faire primer la répression et la violence sur le respect de ses engagements internationaux et européens. La France a ainsi été condamnée à plusieurs reprises par la Cour Européenne des Droits de l’Homme.

Délaissé·es, quels que soient les multiples “statuts” qu’on leur assigne, ressortissant·es français·es - mahorais·es ou métropolitain·es-, réfugié·es, demandeur·euses d’asile, personnes en situation régulière ou non, les habitant·es sont maintenu·es par l’administration française dans la plus grande précarité - jusqu’à se voir dénier toute humanité.

Les manquements de la France à ses obligations nationales, européennes, et internationales, au respect de l’Etat de droit ou encore des valeurs fondatrices de l’Union européenne sont extrêmement inquiétants ! Soignant·es, avocat·es locaux·ales et métropolitain·es, ONGs, Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme, Ligue des Droits de l’Homme, enseignant·es etc., nombreux·euses sont ceux et celles qui nous ont alertés !

Impossible pour moi de rester silencieux

Sur le sol français, sur le sol européen, ces violations des droits humains de la part du gouvernement français sont extrêmement inquiétantes et j’entends dénoncer toutes les infractions que je pourrais constater. Vous pouvez compter sur moi ! Sur place, j’irai à la rencontre des habitant·es, des associations, des soignant·es, des enseignant·es et des avocat·es, pour échanger sur leur quotidien et relayer leurs inquiétudes ; je visiterai les Centres et Lieux de Rétention Administrative (CRA et LRA) comme mon statut de parlementaire m’en donne le droit afin de vérifier que les procédures sont menées dans le strict respect du droit. J’en rendrai compte ici et sur les réseaux sociaux aussi régulièrement que possible. 

Cette opération que le gouvernement français a voulu opaque, pariant sur le désintérêt et l’ignorance des Français·es de métropole, nous devons la dénoncer ! Nous devons nous élever contre cette violence d’Etat qui frappe Mayotte. Nous devons réclamer pour Mayotte et ses habitant·es, nos concitoyen·nes, l’application immédiate et effective de notre triptyque républicain : “Liberté, Egalité et Fraternité”.

La République Française ne peut souffrir d’exception

La France a choisi de garder cette île dans son giron pour des raisons géostratégiques. Qu’elle assume son choix en dotant sa population des mêmes services publics et des mêmes conditions de vie qu’en métropole.