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12 septembre 2023

Qatargate : la droite s’oppose à la transparence et l’intégrité

À la suite du scandale de corruption du Qatargate, le Parlement européen s’apprête à voter, mercredi 13 septembre, la révision de ses règles de fonctionnement interne. Les réformes proposées vont dans le bon sens mais sont, à mon sens, insuffisantes. Une nouvelle fois, le travail de sape de la droite européenne (dont sont membres Les Républicains) empêche le renforcement des règles de transparence, une première étape pourtant nécessaire si l’on veut tuer la corruption dans l’œuf.

Rappelez-vous, il y a neuf mois, en décembre 2022, au cours d’une perquisition au domicile d’Eva Kaïlí, eurodéputée grecque et vice-présidente socialiste du Parlement européen, et de son compagnon Francesco Giorgi, assistant parlementaire, près de 600.000 euros en liquide sont découverts dans de simples sacs. Au même moment, dans l’appartement de l’Italien Antonio Panzeri, ancien député européen et ancien employeur de Monsieur Giorgi, la police belge met la main sur un demi-million d'euros en espèces. S’en suivent arrestations et perquisitions d’autres élu·es européen·nes, actuels ou anciens, de leur domicile ou de leurs bureaux au Parlement, de dirigeant·es d’ONG, etc. 

Cet argent liquide serait la récompense offerte par le gouvernement qatari à celles et ceux qui multiplient les déclarations et les interventions favorables aux intérêts du Qatar, au sein de l’institution européenne notamment. Le Qatargate est né. A chaque nouvelle journée, ses révélations qui, misent bout à bout, finissent par dessiner un réseau plus ou moins bien rodé de corruption où tous les fils mènent à celui qui fut député européen pendant 15 ans, et farouche militant des droits humains, Antonio Panzeri. Évidemment, le doute s’installe quant à sa probité au cours de ses 3 mandats d’élu européen, notamment lors de sa présidence de la Commission des droits de l’homme du Parlement européen.

Le comportement cupide de quelques élu·es jette l'opprobre sur la grande majorité bosseuse et intègre.

Personnellement, je suis sidéré. Tout cela est si éloigné de mon quotidien, de mes combats au Parlement européen et sur le terrain, en totale contradiction avec mon engagement politique.

Comme vous, je découvre tout cela à travers les médias, au compte goutte. Notamment les déclarations d’Eva Kaïlí lors d’un déplacement au Qatar, peu avant la coupe du monde de football, où elle félicite le pays du golfe pour son rôle de « chef de file en matière de droit du travail » et de « modèle des droits humains ». Rien que ça ! Alors même que nous savions, grâce au quotidien britannique The Guardian, que plus de 6.500 travailleur·euses exilé·es avaient perdu la vie sur les chantiers des stades de la coupe du monde et que nous, élu·es écologistes, appelions au boycott de cette coupe du monde de la honte !

Suite à son incarcération en détention préventive et son inculpation pour corruption respectivement, les 10 et 11 décembre, nous décidons, élu·es européen·nes, de destituer Eva Kaïlí de sa fonction de vice-présidente, le 13 décembre, lors d’un vote en session plénière. À ce jour, elle est toujours députée européenne. Tout comme son compagnon et Antonio Panzeri, elle fait l’objet de poursuites judiciaires par la justice belge. D’autres élu·es européen·nes, perquisitionné·es, entendu·es ou même brièvement incarcéré·es, poursuivent aujourd'hui leur mandat parlementaire.

C’est l'institution tout entière qui est entachée et avec elle, le risque d’une défiance vis-à-vis de tou·tes les élu·es. Il faut agir vite et fort ! 

Au-delà de cette affaire du Qatargate, l’objectif, c’est que cela ne se reproduise pas. Nous devons rendre impossibles les attaques à l’intégrité et au fonctionnement de notre institution. C’est un enjeu démocratique immense.

C’est la raison pour laquelle une refonte des règles de fonctionnement interne pour améliorer la transparence et le suivi du travail des député·es a été proposée et sera votée mercredi 13 septembre à Strasbourg.

La réforme proposée va dans le bon sens. Les écologistes sont de loin celles et ceux qui ont le plus poussé pour une réforme d’ampleur. Parmi les avancées positives, on peut noter :

  • La création d’un comité consultatif sur la conduite des député·es avec des expert·es indépendant·es pour signaler les violations du règlement interne ;

  • La publication de toutes les réunions avec tou·tes les lobbyistes que rencontrent les élu·es ;

  • Une déclaration de patrimoine obligatoire pour tou·tes les député·es en début et en fin de mandat.

Mais cela n’est pas suffisant. Il faut aller beaucoup plus loin ! Nous, les écologistes, avons ainsi proposé de renforcer massivement la transparence, notamment sur les « activités complémentaires » des député·es. Une jolie expression pour décrire les emplois rémunérés de certain·es élu·es pour faire la promotion de telle ou telle industrie. Une pratique scandaleuse qui devrait être purement et simplement interdite. Comme à l'Assemblée nationale, toutes les sources de revenu des parlementaires devraient être déclarées, dès le premier centime ! Enfin, pour celles ou ceux qui s’entêtent à ne pas respecter les règles, il ne faut pas s’en tenir à un blâme protocolaire mais introduire des sanctions pécuniaires dissuasives, entre autres.

Ces règles relèvent du bon sens. Tou·tes les parlementaires, en tant que représentant·es des citoyen·nes et donc investi·es de leur confiance, devraient s’y plier.

Une conviction que ne partagent visiblement pas les élu·es de droite, bien résolu·es à  saboter et édulcorer la réforme. Jeudi dernier, en Commission des affaires constitutionnelles, les député·es du groupe Parti Populaire Européen (PPE, la droite européenne) ont rejeté les propositions de divulgation du patrimoine ou de publication des réunions avec les lobbyistes. Nos collègues conservateur·rices auraient-ils·elles un souci avec la transparence ? Avec le fait de rendre des comptes aux citoyen·nes européen·nes ? Avec le fait de ne pas pouvoir profiter d’un mandat électoral pour s’enrichir ?

En tous cas, une chose est sûre : ce mercredi en séance plénière à Strasbourg, la droite compte bien persister et signer, en tentant de ruiner les efforts de ces derniers mois. Pire, elle prévoit d’empêcher le Parlement européen de se doter de règles plus fortes pour lutter contre la corruption. Une nouvelle tâche sur la copie du groupe du PPE, après son opposition farouche - et infructueuse - à la loi de restauration de la nature en juillet dernier.

Pour ma part, je voterai en faveur de cette réforme et de ses avancées. Je tenterai également de la renforcer en soutenant les amendements de progrès qui visent à l’améliorer. Le combat pour la transparence et contre la corruption continue ! Vous pouvez compter sur moi !