Skip to main content

Directive sur la performance énergétique des bâtiments : une avancée écologique et sociale

12 mars 2024

Bonne nouvelle sur le front de la lutte contre le changement climatique et la hausse du coût de la vie ! Ce mardi 12 mars, le Parlement européen vient d’adopter une nouvelle directive sur la performance énergétique des bâtiments.  

1. Quel est l’enjeu ?

Le problème est double : écologique et social. 

Les bâtiments sont responsables de 36% des émissions de CO2 de l’UE et de plus de 40% de la consommation d’énergie. Améliorer leur performance énergétique, c'est-à-dire rendre le bâti plus sobre en énergie, est un des nerfs de la guerre dans la nécessaire transition. Toutes les études sur le financement de la transition soulignent que la majeure partie de l’effort (entre 40% et 60% des investissements totaux) concerne la rénovation thermique des bâtiments. C’est donc le chantier prioritaire !

Logements dégradés riment aussi avec précarité. Ce sont les foyers les plus pauvres qui vivent dans de véritables passoires thermiques, sans avoir les moyens pour faire des travaux de rénovation. L’explosion des tarifs de l’énergie suite à l’invasion russe de l’Ukraine a montré les effets de la précarité énergétique sur les plus précaires : plus d’un quart des ménages ont souffert du froid chez eux en 2023, selon des chiffres de la Fondation Abbé Pierre. Agir sur la rénovation thermique des bâtiments redonne du pouvoir d’achat ou plutôt pourvoir de vivre aux occupants de ces logements.

La réhabilitation des bâtiments est également une immense opportunité en termes de création d’emplois. Technicien·nes, maçons, ingénieur·es et autres spécialistes de la rénovation énergétique : plus de 160.000 créations d’emplois sont nécessaires d’ici à 2030 pour atteindre les objectifs fixés dans la stratégie européenne pour une vague de rénovation pour l’Europe, selon des chiffres de la Commission. 

Une politique de rénovation ambitieuse et aboutie peut donc avoir des effets extrêmement positifs sur le plan écologique, social et économique. 


2. Qu’est-ce qu’il y a exactement dans cette directive ?

Le texte adopté aujourd’hui est une refonte d’une ancienne directive aux résultats très mitigés. L’enjeu était d’introduire à la fois des exigences contraignantes de rénovation et des objectifs à moyen et long terme sur l’efficacité énergétique du parc immobilier, tout en ciblant les chantiers prioritaires. 

Plusieurs éléments sont très positifs, je m’en réjouis. 

Avant toute chose, il faut un plan. Les États membres sont désormais tenus d’adopter des feuilles de route précises pour atteindre des objectifs de performance à la fois sur le parc résidentiel et les bâtiments publics. La consommation d’énergie moyenne du parc résidentiel devra diminuer d’au moins 16% d’ici à 2030. Sur le bâti public, c'est-à-dire écoles et hôpitaux au premier chef, l’État et les collectivités devront rénover plus d’un quart de ce patrimoine d’ici à 2033, en se concentrant sur les bâtiments les moins performants. 

Afin d’encourager la construction de nouveaux bâtiments vertueux, les émissions de gaz à effet de serre sur l’ensemble du cycle de vie, c’est à dire en prenant en compte les émissions intégrées dans les matériaux de construction (le béton par exemple est bien plus polluant que le bois), devront être calculées pour les nouvelles constructions à partir de 2030. Un nouveau cadre particulièrement ambitieux pour les bâtiments zéro émissions est également mis en place. 

Le texte prend aussi à bras le corps la question photovoltaïque : les bâtiments publics et non résidentiels, centres commerciaux, usines, entrepôts et autres, à partir d’une certaine surface, devront obligatoirement se doter d’une installation solaire d’ici 2030. C’est une avancée de bon sens alors que je ne cesse de m’étonner quand je vois des toits d’usines ou d’entrepôts ou encore des parkings vides de panneaux solaires. 

Le texte intègre aussi des considérations sociales très importantes. On le sait, les prix des chantiers de réhabilitation thermique sont très souvent prohibitifs pour les ménages les plus modestes et même les classes moyennes. Même en additionnant les aides, le reste à charge est souvent impossible à supporter. La directive adoptée aujourd’hui va obliger les États à flécher les financements de manière prioritaire vers les ménages vulnérables. De plus, pour aider les citoyens et citoyennes à trouver leur chemin dans le labyrinthe administratif des aides, des mécanismes de conseil accessibles gratuitement devront être mis en place.  Enfin, alors que les interventions pour impayés de charges et de loyer ont explosé depuis deux ans, des mesures de protection sociale devront obligatoirement être prises, parmi lesquelles l’interdiction des augmentations de loyer disproportionnées et des expulsions. 


3. Les bémols ?

Seuls bémols à mon goût : 

  • Le texte incluait originellement une obligation d’élimination progressive des chaudières à combustibles fossiles. Outre les émissions liées à ces chaudières, c’est le gouffre financier qu’elles représentent souvent pour les ménages qui devrait nous inciter à passer aux pompes à chaleur et autres technologies vertueuses le plus rapidement possible. Toutefois, cédant au lobby du gaz et aux pressions de la droite, cette obligation contraignante devient juste une « vision ». Seule consolation : dès l’année prochaine, toutes les aides à l’installation de chaudières fossiles seront prohibées dans l’UE. 

  • Deuxième problème : le texte ne comporte aucune disposition sur la nécessaire formation de technicien·nes et des ingénieur·es. Quand on connaît les difficultés de recrutement actuelles et les besoins à venir, si nous ne mettons pas le paquet sur la formation, nous allons droit dans le mur. 

En somme, ce texte est un pas dans la bonne direction. La rénovation énergétique des bâtiments est la preuve qu’écologie et préoccupations sociales sont non seulement compatibles mais qu’elles se renforcent mutuellement. Rénover les logements en commençant par les plus dégradés c’est la forme la plus simple de transition juste et inclusive, dans un contexte de crise sociale en France et en Europe, c’est aussi la plus urgente ! Vous pouvez compter sur moi pour continuer à me battre et mettre les bouchées doubles.