Certaines élections pèsent une tonne. Elles ressemblent à une enclume. Un boulet.
Elles ont le goût de l’arsenic, un pouvoir de destruction démesuré : comme une illusion violemment douchée, ou comme un matin de lumière vive soudain fracassé par l’orage… Et encore : l’orage, c’est bien trop beau. Surtout, la poésie n’a rien à voir dans cette élection-là.
Celle que nous venons de subir, dimanche 24 avril 2022.
Une élection poison : si on refuse de la regarder en face, elle peut tuer.
Elle est le revers sale de la médaille : un miroir qui condamne en même temps qu’il offre la vérité. Brutale.
Dimanche, à 20 heures, Emmanuel Macron a été réélu Président de notre République.
58,54% d’entre nous ont glissé son bulletin, à lui, dans l’urne : pour retenir à bout de bras son chant de l’extrême, à elle, Marine Le Pen, et ainsi lui bloquer l’accès à la scène suprême.
Si l’on observe à la loupe : pendant que 58,54% des nôtres confiaient leur lutte à Macron, 41,46% confiaient leur peine à Le Pen, et 28,01 % choisissaient le silence : écrasé·e·s, meurtri·e·s par les souffrances qui pleuvent depuis… depuis si longtemps.
Les Françaises et les Français souffrent. De toutes parts, le vernis craque. L’air est désormais irrespirable, et le poids de l’époque que nous endurons enfonce nos talons chaque matin plus profondément dans le sol. Nous voilà pétrifiés. Enlisés. Notre si précieux modèle social est à l’agonie, l’hôpital à bout de souffle, les soignant·e·s exténué·e·s, les enseignant·e·s aussi : les inégalités torpillent l’énergie qui reste aux plus résistant·e·s.
De quoi se mordre sérieusement la lèvre avant de s’emparer du micro pour parler.
Décence. Respect. Responsabilité.
Je fais partie des 58,54%.
J’ai mis un bulletin Macron dans mon enveloppe de second tour parce que j’ai l’intime conviction que l’extrême-droite ne doit pas s’emparer du pouvoir. Je l’ai fait, et pourtant, je hais l’action Macron. Le racisme d’État, la maltraitance systémique, la violence envers les plus vulnérables, le mépris des invisibilisé·e·s, l’injustice insupportable -sociale, fiscale, économique, éducative, alimentaire, énergétique, l’injustice ignoble et globale, lancée comme une gifle au visage des moins favorisé·e·s. Et cette façon de sourire en violentant.
La nausée.
Quant à la non-action du Président ? Je la hais tout autant. J’ai tenté de la combattre en déposant la toute première plainte contre son inaction climatique et le Conseil d’État m’a donné raison : la France - son gouvernement et son chef jupitérien, a ainsi été condamnée.
Oui, je la hais, l’action Macron. Mais… face à elle, la lutte est possible : à la différence de l’action Le Pen, l’action Macron est à portée de révolution.
Et l’heure est venue.
Depuis 20 heures et 1 seconde, dimanche soir, l’objectif est clair : contraindre le Président à mettre en œuvre une autre politique. Le forcer à ré-humaniser. L’obliger à changer les orientations, entraver son pouvoir de nuisance et tenter d’alchimiser sa réélection afin qu’elle se mue en printemps de nos valeurs de gauche.
Nous n’avons pas le choix.
Notre survie dépend d’une Assemblée nationale transmutée, une Assemblée qui défende les valeurs écologistes et sociales qui sont les nôtres, nous, écologistes.
Avec les insoumis·e·s.
Avec les communistes.
Avec les socialistes.
Nous, âmes de gauche, avons le devoir d’enjoindre le chef de l’État à renouer avec le cœur. Dont nous n’avons pas le monopole… Tant mieux.
Nous, âmes de gauche, avons le devoir de lier nos luttes pour n’en obtenir qu’une, si solide qu’elle puisse faire face à tous les poisons : cette lutte unique et forte, c’est la lutte pour l’amélioration de la vie de chacune, de chacun.
Oui, nous, âmes de gauche, devons nous liguer pour parvenir aux accords qui nous permettront d’être majoritaires dans ce troisième tour désormais lancé : les élections législatives de juin prochain.
Incarnons la cohérence.
Retrouvons-nous, mettons-nous autour de la table, écoutons, respectons, et passons à l’action.
Soyons convaincu·e·s.
Soyons cohérent·e·s.
Chacun·e va souhaiter constituer son groupe à l’Assemblée nationale : très bien. C’est ainsi que vit la démocratie. Laissons faire sans crainte : la clé se trouve dans la cohérence. Je l’ai appris au cours des 18 années durant lesquelles j’ai été maire de Grande-Synthe, dans les Hauts-de-France.
La cohérence : lorsque chaque décision est prise dans un but unique, un but commun. Notre but commun : améliorer la vie de chacun·e de nos concitoyen·ne, faire du retour à la vie, tout simplement, notre dénominateur commun.
La cohérence : précisément la raison pour laquelle j’avais voté - conviction chevillée au cœur !, pour Yannick Jadot lors du premier tour de cette élection.
La cohérence : celle-là même qui existe dans chacune des lettres du mot « écologie ». Car tout est lié : le pouls, la sève de notre société, et notre santé, ce que nous buvons, ce que nous mangeons, ce que nous respirons, ce que nous apprenons, ce que nous transmettons, ce que nous célébrons, ce que nous chérissons, comment nous bougeons, comment nous transportons, ce que nous émettons…
Ce que nous sommes.
Ce que nous semons.
Alors, agissons. Agissons en écologistes sociaux, en écologistes solidaires, en écologistes systémiques, en écologistes courageux, en écologistes résilients, en écologistes dignes.
Allons à l’essentiel.
Damien Carême
Député européen
Député Européen Verts / ALE**,
Président de l’Association Nationale des Villes et Territoires Accueillants.
Damien Carême est né en Lorraine.
Il est élu maire de Grande-Synthe, dans le Nord, en 2001 et le reste jusqu’en mai 2019, date à laquelle il entre au Parlement européen.
Durant 18 ans, à Grande-Synthe, il mène une politique mue par l’écologie sociale et transforme ainsi radicalement la ville. Capitale française de la biodiversité en 2010, Grande-Synthe voit naître des jardins partagés, des quartiers totalement repensés, des repas 100% bio et locaux dans toutes les cantines, une démarche d’autonomie alimentaire, des transports en commun gratuits, un minimum social garanti (MSG) pour les habitants vivant sous le seuil de pauvreté, une université populaire, des ateliers de fabrique de l’autonomie… Un objectif, clair : créer du sens commun et véritablement entrer « en transition ».
En mai 2019, il est élu député européen. Avec 12 autres élu.e.s, il rejoint alors le groupe des Verts / ALE au Parlement européen, où il intègre plusieurs commissions : la Commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures (LIBE), la Commission industrie, recherche et énergie (ITRE) et la Commission des affaires économiques et monétaires (ECON). Il intègre également une délégation : la délégation Afrique du Sud. * Ce qui l’anime ? Poursuivre les missions et les combats entamés à Grande-Synthe, agir à grande échelle en faveur de l’écologie sociale, respectueuse de la dignité, des droits fondamentaux et de la justice environnementale.
Fin 2015, le conflit syrien pousse à l’exil des milliers de personnes. A Grande-Synthe, ces femmes, ces hommes et ces enfants réfugié.e.s arrivent et stagnent dans des conditions indignes : Damien Carême, contre l’avis de l’Etat, réagit et avec l’aide de Médecins Sans Frontière, met en place le premier camp humanitaire sur le territoire français. Dans la foulée, il fonde l’Association Nationale des Villes et Territoires Accueillants, qu’il co-préside aujourd'hui avec Jeanne Barseghian.
En mai 2019, il est élu député européen. Avec 12 autres élu.e.s, il rejoint alors le groupe des Verts / ALE au Parlement européen, où il intègre plusieurs commissions : la Commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures (LIBE), la Commission industrie, recherche et énergie (ITRE) et la Commission des affaires économiques et monétaires (ECON). Il intègre également une délégation : la délégation Afrique du Sud.
Ce qui l’anime ? Poursuivre les missions et les combats entamés à Grande-Synthe, agir à grande échelle en faveur de l’écologie sociale, respectueuse de la dignité, des droits fondamentaux et de la justice environnementale.
Et le 1er juillet 2021 ? Ce jour-là, Damien Carême vit une victoire majeure : dans la matinée, le Conseil d’État rend en effet un arrêt historique dans lequel il sanctionne le gouvernement pour inaction climatique et l’enjoint à prendre, dans un délai de neuf mois, « toutes mesures utiles permettant d’infléchir la courbe des émissions de gaz à effet de serre produites sur le territoire national afin d’assurer sa compatibilité avec les objectifs » du pays. Si cette victoire est un pas de géant pour le climat ainsi qu’un véritable séïsme judiciaire, elle est également la concrétisation de la lutte d’un homme qui, un jour de novembre 2018, avait entamé, seul contre l’État, un recours pour inaction climatique. Impossible pour lui de se résoudre à laisser aux générations futures un monde invivable… »
- Président de l'Association des Maires Ville & Banlieue de France en 2014-2015
- Prix Nord/Sud du Conseil de l'Europe en 2018
- Prix Éthique et Société, avec Mention Spéciale du Jury, de la fondation Pierre Simon en 2016
- 9e "Meilleur maire du monde", décerné par la City Mayor Fondation en 2016
- 2016, « On ne peut rien contre la volonté d’un homme » (éd. Stock), livre écrit avec Maryline Baumard